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29 Mar 2016 | Observatoire
 

APHPLes propos de Michel Aubier (chef du service de pneumologie de l’hôpital Bichat) – à propos des effets de la pollution atmosphérique – avaient rallumé la polémique (voir Lmdt du 16 mars) sur les liens entre le lobbying de l’industrie (pétrolière dans ce cas) et certains membres du corps médical.

Mais il semblerait plus nombreux à être concernés, selon une enquête interne de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) révélée (en une) par Le Monde en date du 29 mars : une bonne partie des 10 000 médecins du premier groupe hospitalier de France (50 % de la recherche clinique) présente des « situations à risques » de conflits d’intérêts en raison de leurs liens avec l’industrie pharmaceutique.

« Les rémunérations annexes, parfois opaques et élevées, sont des stimulants suffisamment importants pour que des professionnels se placent, de plein gré ou malgré eux, dans des situations à risques », insiste le groupe de travail, qui a travaillé sur le sujet pendant près de six mois.

Sont pointés du doigt :

. le financement par les laboratoires des déplacements des médecins de l’AP-HP aux congrès médicaux ; ce qui représenterait,  par exemple, une somme de près de 40 millions d’euros par an ;

. la formation continue : obligatoire, elle est financée en France à hauteur de 98 % par l’industrie pharmaceutique ; si le détail du financement reste opaque, le groupe de travail de l’AP-HP évalue la « fourchette entre 300 millions et 600 millions d’euros » chaque année ;

. les essais cliniques : l’expertise des médecins, rémunérée par des honoraires, échapperait à tout contrôle ; la plupart des services hospitaliers ayant souvent une « association » pour gérer la cagnotte versée par l’industrie. Plus de 400 dénombrées par l’AP-HP ;

. enfin, les médecins, devenus experts sur un médicament qu’ils ont contribué à développer, participent souvent à leur promotion, certains doublant ainsi leur salaire.

Pour Martin Hirsh, directeur général de l’AP-HP : « il n’est pas question de couper toute relation avec les industriels, cela nuirait à la recherche et au progrès médical. Mais, il faut clarifier certaines situations. Il faut que toute activité rémunérée au profit d’un industriel soit déclarée et bien soumise à autorisation préalable. Et éviter le lien de dépendance direct entre industriel et médecin ». Outre la mise en place d’une structure neutre, le groupe de travail propose de soumettre à autorisation les activités extérieures des médecins (devenus experts sur le médicament qu’ils ont développé) et de les limiter à « cinq ou dix heures » hebdomadaires.

De quoi relativiser la chasse contre « le lobby du tabac » de Michèle Delaunay (voir Lmdt du 22 mars).