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9 Sep 2014 | International
 

L’efficacité du ZMapp, le traitement expérimental à base de tabac contre le virus Ebola, a été confirmée récemment (voir Lemondedutabac des 30, 24 et 6 août). Les plants de tabac pourraient également lutter contre d’autres épidémies – grippe aviaire, H1N1 ou VIH – et les scientifiques voient une prometteuse « usine à médicament ». Enquête scientifique et industrielle dans la dernière édition du Journal du Dimanche, le 7 septembre.

Plant tabac Ebola• La start-up californienne Mapp Biopharmaceutical, qui a développé ce cocktail de trois anticorps, a choisi de le produire sur des plants de tabac. « Le tabac est utilisé depuis longtemps comme plante modèle en labo : on connaît bien son génome, on a su très tôt le transformer », explique Danièle Werck, directeur de recherche CNRS à l’Institut de Biologie  moléculaire des Plantes, à Strasbourg, « ce grand volume de matériel végétal permettrait d’obtenir un grand volume de molécules d’intérêt thérapeutique ».

• L’idée de base est de transformer des plants de tabac en « usines de protéines » pour obtenir des anticorps (voir Lmdt du 9 août). Les chercheurs utilisent pour cela des « protéines recombinantes ». Puisque les machines de protéines sont les mêmes chez les végétaux et les animaux, en infiltrant provisoirement un ADN étranger dans la plante, on peut la forcer à produire des protéines humaines. Avec des résultats rapides : les anticorps apparaissent dans les feuilles quelques jours après avoir infiltré les tissus végétaux de jeunes plants ; on peut même transformer le tabac de manière durable par une intégration dans les gènes de la plante.

• Ces « usines végétales » offriraient un grand avantage : produire des milliers de doses à moindre coût et en un temps record. « Entre le moment où le chercheur isolera le virus et celui où l’on produira les anticorps destinés au malade, cela prendra quelques semaines contre deux à trois mois pour un vaccin produit à base d’œuf ou d’autres systèmes provenant d’animaux », estime Frédéric Bourgaud, professeur à l’université de Lorraine et spécialiste en biotechnologies.

• Avec ce procédé, on pourrait produire des protéines à visée cosmétique, diagnostique, thérapeutique… Les recherches explosent et les industriels du tabac investissent. KentuckyBioprocessing, filiale du cigarettier américain Reynolds, participe ainsi au projet ZMapp (voir Lmdt du 7 août).
Si celui-ci ne verra pas le jour à grande échelle avant des mois, la société canadienne Medicago (qui appartient en partie à Philipp Morris International), semble plus près du but. Leader du secteur, elle s’est focalisée sur le développement de vaccins antigrippaux à partir de Nicotiana modifié. La dernière phase d’essais cliniques de son vaccin pandémique débutera l’an prochain, visant l’homologation en 2017. Dans ses tuyaux aussi, des vaccins saisonniers, contre la rage ou le rotavirus (première cause de diarrhée aigue chez les jeunes enfants).