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10 Fév 2016 | Pression normative
 

Cour des Comptes Didier MigaudOn sait que dans son rapport annuel, la Cour des comptes revient sur son évaluation de la politique anti-tabagique des pouvoirs publics (voir Lmdt du 10 février) et s’appuie sur les chiffres du marché officiel, lors des trois premiers trimestres de l’année dernière, pour rappeler la nécessité d’utiliser plus vigoureusement la politique fiscale et son corollaire : l’augmentation des prix.

« On ne peut pas encore parler d’inversion de tendance durable » mais « de contre-performance certaine » assène le rapport qui insiste lourdement sur sa préconisation « d’un relèvement soutenu des prix, en usant de l’outil fiscal ».

Tout cela, avec l’autorité qui sied à cette grande institution de la République.

Et le tour est joué : vite, une augmentation des prix ! La Cour nous y enjoint !

Tout cela, encore, sans la moindre tentative d’explication, sérieuse et complète, sur cette « hausse » qu’il est nécessaire de regarder de près : sur les trois premiers trimestres de l’année, le marché officiel des cigarettes (soit 84 % du marché global) a augmenté, en volume, d’un petit + 0,6 %, alors que celui du tabac à rouler enregistrait un + 6,8 % et que les cigares/ cigarillos accusaient un -2,6 %.

Rappelons aussi que nous sortons de plusieurs années continues de baisse du marché.

De façon précipitée, la Cour des comptes pointe l’absence de hausse de prix en début d’année.

Mais elle aurait été inspirée d’ajouter d’autres hypothèses (sachant que nous raisonnons sur les trois premiers trimestres) :

 les moindres séjours de vacances à l’étranger de nos concitoyens, pour des raisons liées au contexte géopolitique ; de même, notre pays a accueilli plus de vacanciers européens ;

 le tassement du marché de la cigarette électronique : certains vapoteurs sont revenus vers le tabac à rouler ou la cigarette ;

 les conditions climatiques exceptionnelles qui ont été constatées sur plusieurs mois … les fumeurs ont eu tout le loisir de rester plus longtemps   à l’extérieur et donc de fumer un peu plus ;

 et malheureusement, la prédominance de certains facteurs anxiogènes (comme le sentiment de menace terroriste qui a pesé sur le pays) ou cette courbe du chômage qui n’arrive pas à s’inverser.

La Cour des comptes omet de citer le taux de prévalence tabagique parmi les chômeurs : 48,2 % (voir Lmdt du 24 février 2015).

Le marché du tabac – comme le comportement des fumeurs – répond à des ressorts complexes que l’on ne peut réduire qu’à un seul facteur. Ne serait-ce le prix.